Malgré tous ses atouts et toutes ses qualités, la série American Gods n’est pas la claque attendue. Par abus d’images kitsch, Bryan Fuller dénature finalement l’œuvre qu’il devait adapter.
Dès sa parution, le roman fleuve de Neil Gaiman (comme ses autres œuvres) aura tapé dans l’œil des producteurs d’Hollywood. Road trip atypique prenant la forme d’une déambulation punk à travers l’Amérique, l’ouvrage provoque la collision étonnante entre un panthéon mythologique décrépi (mythologies viking, romaine etc.) et un animisme post-moderne étonnant. A partir d’une guerre entre anciens et nouveaux dieux (Internet, les médias, l’argent) se détache un récit initiatique non dénué d’une dimension philosophique. Un unique roman qui offre déjà une matière assez dense le rendant d’office inadaptable pour le cinéma (ce qui était un peu voulu par l’auteur). Mais avec le boom d’HBO et « l’âge d’or » des séries qui pointe le bout de son nez dans les années 2000, l’idée refait surface.
Le développement sera néanmoins chaotique. Malgré le soutien de Tom Hanks au début, HBO finit par jeter l’éponge. La chaîne Starz (Black Sails, Outlander), toujours prête à marcher dans le sillon de sa grande sœur, récupère les droits et se paye Bryan Fuller, tout juste sorti d’Hannibal. En renfort arrive Michael Green, créateur de la prometteuse Kings (annulée trop tôt) tandis que Gaiman promet de suivre la chose de très près. Les fans ont l’air convaincu, le budget et la liberté créatrice sont là. Aucune raison de s’inquiéter donc.

Dire que cela ne s’améliore pas ensuite serait mentir. American Gods a ses qualités, à commencer par un casting alléchant. Autour de Ian McShane (John Wick, Deadwood) et Ricky Whittle (The 100) se construit un panthéon de seconds rôles honorables : une Gillan Anderson carnavalesque à souhait, un Peter Stormare crasseux, un Crispin Glover multipolaire et même un Orlando Jones (Evolution, Sleepy Hollow) affable et spectaculaire. Mais toutes ces tronches ne font que défiler à l’écran, offrant le temps de quelques minutes une performance électrisante, avant de disparaître aussi vite. Cette exhibition de vedettes a au moins l’intérêt de maintenir éveillé en venant ça et là dynamiter une écriture qui a bien du mal à cacher sa difficulté a appréhender un roman complexe.

Mais malgré tout, c’est dans ses infidélités au matériau de base qu’American Gods trouve parfois son salut. Le développement surprenant de deux personnages secondaires, Laura (Emily Browning) et Mad Sweeney (Pablo Schreiber) offre un appel d’air salvateur dans cet étalage prétentieux de philosophie de bazar et d’images numériques. Le duo mal assorti fait des étincelles, à tel point que la série atteint son pic émotionnel dans cet épisode un peu à part qui nous raconte les origines du leprechaun. On se retrouve dans la situation gênante où l’histoire d’une émigrée anglaise (également jouée par Browning) du XVIIIe est plus intéressante que tous ces dieux à peine capables de faire des effets spéciaux corrects. Et c’est un peu triste.

American Gods : bande-annonce
American Gods : fiche technique
Création : Michael Green et Bryan Fuller
Réalisation : David Slade
Scénario : Neil Gaiman, Michael Green et Bryan Fuller
Casting : Ricky Whittle Ombre Moon (Shadow Moon en VO), Ian McShane : Voyageur (M. Wednesday en VO), Emily Browning (Laura Moon), Pablo Schreiber (Sweeney le Dingue/ le Leprechaun), Crispin Glover : M. Monde (M. World en VO)…
Genre : fantasy, action, drame
Chaîne d’origine : Starz
Nb. de saisons 1
Durée : 59-63 minutes
Production : FremantleMedia; Living Dead Guy Productions
Diff. originale 30 avril 2017 – en production
Site web http://www.starz.com/series/americangods
États-Unis - 2017